CONAKRY — Le Fonds de Garantie des Prêts aux Entreprises (FGPE) serait confronté à l’une des crises les plus sérieuses de son histoire récente. Selon plusieurs sources, les tensions entre le Directeur général (DG), son équipe dirigeante et le personnel se seraient aggravées à la suite d’une réunion stratégique tenue il y a quelques semaines au siège de l’Association professionnelle des banques, en présence du Conseil d’administration (CA) et de la Direction générale.
À l’ordre du jour figuraient notamment le suivi des recommandations formulées le 20 février 2025, les rapports des comités d’investissement, de rémunération et d’audit, ainsi que divers points relatifs à la gestion interne.
Dès l’ouverture, le ton aurait été donné : le CA aurait exprimé son vif mécontentement, reprochant au DG de ne pas avoir exécuté plusieurs recommandations jugées essentielles par le comité d’audit, et ce, malgré l’expiration des délais.
Le recrutement récent d’une directrice financière et d’un directeur des ressources humaines, effectué sans consultation du Directeur général adjoint (DGA), aurait également suscité l’irritation du Conseil. Par ailleurs, la volonté réaffirmée du DG de procéder à des licenciements, sur la base d’un rapport attendu du cabinet Trust Africa, diviserait profondément. Officiellement, il s’agirait de « rationaliser les effectifs » comme l’a dit le directeur général, mais en interne, certains y verraient une purge ciblée visant des collaborateurs jugés gênants.
En toile de fond, un passif judiciaire pèserait encore sur le dirigeant. Une plainte, en cours à la Direction de la police judiciaire (DPJ), concernerait l’affaire des visas destinés à des entrepreneurs guinéens pour l’Exposition universelle Osaka 2025, qui auraient été attribués à des bénéficiaires non éligibles, dont certains n’auraient jamais regagné la Guinée après l’événement.
Face à ces tensions, le président intérimaire du CA aurait fixé un ultimatum : d’ici la prochaine réunion dans un mois, le DG devra prouver sa capacité à collaborer efficacement avec son DGA et le personnel, optimiser les ressources, obtenir les agréments réglementaires et régulariser les anomalies signalées par le commissaire aux comptes. Faute de quoi, un changement à la tête du FGPE pourrait être acté.
En coulisse, l’atmosphère serait loin d’être apaisée. Méfiance, alliances discrètes et stratégies de positionnement rythmeraient le quotidien, dans un contexte où le gouvernement pourrait envisager un plan B, en misant sur un profil plus consensuel, expérimenté et doté d’un solide réseau pour relancer l’institution.
Au-delà d’une querelle de gouvernance jugée catastrophique, c’est la crédibilité même du mécanisme de garantie des prêts aux entreprises qui serait en jeu. Pilier stratégique pour soutenir l’entrepreneuriat et la relance économique en Guinée, le FGPE ne peut se permettre une instabilité prolongée, au risque de freiner la dynamique de réformes voulue par le président Mamadi Doumbouya.
Les prochaines semaines s’annoncent décisives : au FGPE, la bataille ne se joue pas uniquement sur les chiffres, mais aussi sur l’art de manœuvrer.
Par Lansana Yansané