Alors que C8 arrête d’émettre sur la TNT ce vendredi soir, la décision de l’Arcom fait toujours polémique. « On est en train d’affaiblir la TNT, c’est-à-dire la télévision du plus grand nombre », dénonce le sénateur LR Max Brisson. Mais pour le sénateur PS Yan Chantrel, « c’était important de montrer qu’on ne pouvait pas tout se permettre. Ce n’est pas le tout et n’importe quoi ».

C la fin. C8 arrête d’émettre ce vendredi soir, à minuit. La chaîne du milliardaire Vincent Bolloré, qui a mis son empire médiatique au service de l’extrême droite, a perdu sa fréquence sur la TNT, à la suite d’une décision du régulateur du secteur, l’Arcom (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique), confirmée le 19 février par le Conseil d’Etat. Même sort pour NRJ 12. Les deux chaînes vont être remplacées par T18, qui sera lancée en juin par le groupe CMI France, détenue par le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, et en septembre par OFTV, chaîne du groupe Ouest-France.

Concernant C8, la chaîne paie notamment les frasques de son animateur star, Cyril Hanouna, de nombreuses fois rappelé à l’ordre par l’Arcom pour une série de dérapages durant son émission « Touche pas à mon poste », TPMP. Une non-maîtrise de l’antenne, qui a commencé à coûter relativement cher à C8. Au total, Cyril Hanouna est responsable de 7,6 millions d’euros d’amendes. Mais malgré les sanctions, C8 a laissé son animateur garder sa ligne. L’Arcom a finalement utilisé ce qui constitue l’arme nucléaire du régulateur : le non-renouvellement de la fréquence TNT.

La droite et l’extrême droite sont montées au créneau pour prendre la défense de la chaîne de Vincent Bolloré

L’affaire est devenue éminemment politique. Car la droite et l’extrême droite sont montées au créneau pour prendre la défense de la chaîne de Vincent Bolloré. « C8 avait trouvé son public. Sa disparition du paysage audiovisuel la prive d’un espace d’expression », a réagi le 19 février le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau. « La fermeture de C8 est choquante. Si on n’aime pas Hanouna, on change de chaîne, mais on ne supprime pas la chaîne. Encore une fois, une autorité administrative, l’Arcom, se moque de la volonté des Français en supprimant une chaîne populaire parce qu’elle appartient à un groupe qui ne pense pas comme « il faut » ! » a réagi sur X Laurent Wauquiez, à la tête du groupe des députés LR.

Selon le sénateur des Pyrénées-Atlantiques, « les arguments restent vagues ». Roch-Olivier Maistre (ancien président de l’Arcom, ndlr) « a dit que c’était la volonté d’élargir le spectre de la TNT, en termes d’offre, en particulier sur les territoires, avec le projet porté par Ouest France. Les réponses de Maistre ne portent pas sur Hanouna », note le sénateur.

Pour Max Brisson, avec cette décision, « on est en train d’affaiblir la TNT, c’est-à-dire la télévision du plus grand nombre, la télévision des gens non connectés. Que ça plaise ou non, C8 avait trouvé son public ». « Si la TNT ne fait plus d’audience, on justifiera qu’on n’entretienne plus les relais », ajoute-t-il. « Je sais que ça déplaît, que des gens pensent qu’on doit faire le bonheur du peuple malgré lui, avec une idée méprisante du peuple », lance le sénateur LR. Selon ce proche de Bruno Retailleau, « l’Arcom a commis une faute dont on reparlera ».

« La décision de ne pas renouveler l’autorisation n’a rien de choquant », selon Laurent Lafon

Mais pour le sénateur centriste Laurent Lafon, président de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat, la décision de l’Arcom doit être respectée. « La décision de ne pas renouveler l’autorisation n’a rien de choquant », selon le centriste.

« Il n’y a pas de pays démocratique sans organisme de régulation indépendant des médias. L’Arcom a répondu aux missions qui sont les siennes », avance le sénateur UDI du Val-de-Marne, qui rappelle « les sanctions et rappels à l’ordre nombreux à l’égard de C8 » : « Il y a eu des comportements pas acceptables dans TPMP, où on a fait passer des personnes handicapées pour des toxicomanes, où on a imposé un baiser forcé à une chroniqueuse ». On pourrait ajouter des faux policiers qui se font passer pour des vrais, un canular téléphonique homophobe ou les insultes portées au député Louis Boyard.

Laurent Lafon rappelle que « la TNT, ce n’est pas un bien privé mais un bien public qui fait l’objet d’attributions de manière régulière dans le temps. Les responsables de C8 savaient parfaitement qu’ils avaient franchi un certain nombre de lignes rouge au cours du temps ». Il ajoute encore :

 » L’éditeur est tenu de maîtriser son antenne, ça fait partie du cahier des charges qu’il passe avec l’Arcom. Or manifestement, il n’a volontairement pas tenu ses obligations.  »

Source Public Sénat