Les rues de Dakar ont été le théâtre de violentes manifestations qui ont fait 16 morts, selon un bilan actualisé ce dimanche 4 juin 2023. Les partisans d’Ousmane Sonko, un opposant politique, sont descendus dans la rue suite à sa condamnation par la justice, l’empêchant, à priori, ainsi de se présenter à l’élection présidentielle prévue en 2024.

La tension commence à s’apaiser au Sénégal après deux journées marquées par des affrontements. Des heurts ont éclaté entre la police et les manifestants dans les rues de Dakar et d’autres régions du pays, entraînant la perte de 16 vies, selon un bilan mis à jour ce dimanche 4 juin 2023.

Les partisans d’Ousmane Sonko, figure de l’opposition politique, sont descendus dans la rue suite à sa condamnation à deux ans de prison par la justice. Cette décision pourrait le rendre inéligible pour l’élection présidentielle. Alors que la prochaine élection, fixée au 25 février 2024, approche à moins d’un an, elle est déjà au centre de toutes les préoccupations.

Pourquoi les manifestants sont-ils descendus dans la rue ?

La colère des partisans sénégalais d’Ousmane Sonko a été provoquée par une décision judiciaire. Jeudi 1er juin, des manifestations spontanées ont éclaté suite à la condamnation de cet homme politique âgé de 48 ans à une peine de deux ans de prison ferme pour incitation à la « débauche » envers une jeune femme de moins de 21 ans. Il a été acquitté des accusations de viol.

En tant que candidat déclaré pour l’élection présidentielle de 2024, Ousmane Sonko pourrait se voir rendre inéligible par cette décision. Très populaire auprès des jeunes, il dénonce un complot ourdi par le président Macky Sall pour le neutraliser politiquement depuis le début de cette affaire. Ses partisans craignent également son arrestation.

Le ministre de la Justice a déclaré que l’opposant pouvait être arrêté « à tout moment ». Une telle arrestation pourrait raviver le cycle de violences. Ousmane Sonko, qui n’a pas réagi publiquement depuis sa condamnation, affirme être « séquestré » dans sa résidence de Dakar par les forces de sécurité qui empêchent quiconque de s’approcher.

Qui est responsable des violences ?

Dans cette affaire, les deux parties se rejettent mutuellement la responsabilité. Dans un communiqué publié dimanche, le parti de Ousmane Sonko, le Pastef, condamne « la répression meurtrière des forces de défense et de sécurité » et accuse le pouvoir d’utiliser des « milices privées » pour réprimer les civils. Il exhorte toujours les Sénégalais à « se défendre par tous les moyens et à riposter ».

De son côté, le gouvernement dénonce les « actes de vandalisme et de banditisme » perpétrés par les partisans d’Ousmane Sonko, soutenus par des “forces occultes”, des “étrangers” cherchant à “déstabiliser le pays” et à le plonger dans le chaos. Le ministre de l’Intérieur a annoncé samedi avoir procédé à environ 500 arrestations.

Dans un communiqué, la Croix-Rouge a annoncé ce dimanche avoir porté secours à 357 manifestants blessés depuis le début des troubles, dont une femme enceinte, ainsi qu’à 36 membres des forces de défense et de sécurité. Parmi eux, 78 personnes ont été grièvement blessées et ont été évacuées vers des établissements de santé.

Comment évolue la situation ?

Les tensions semblent se calmer. Dimanche, les forces de sécurité étaient moins présentes dans les rues de Dakar. Le ministère de l’Intérieur a signalé une “nette diminution des points de tension et des arrestations”. La vie a repris presque normalement avec la fin de l’interdiction de circulation des deux-roues.

Cependant, le gouvernement a coupé l’accès à Internet sur les téléphones en raison de la diffusion de messages haineux et subversifs, alors que les réseaux sociaux tels que WhatsApp, Facebook ou Twitter étaient déjà inaccessibles.

La menace d’une résurgence des violences plane toujours. Samedi soir, l’un des leaders de la coalition de l’opposition, le maire de Dakar Barthélémy Dias, a appelé le président Macky Sall à s’exprimer et à renoncer à se présenter pour un troisième mandat. Le président entretient le doute quant à sa possible candidature.

Les appels à la retenue et au dialogue se sont multipliés ces deux derniers jours. Les Nations Unies, l’Union africaine et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont condamné les violences. La France, dans un communiqué, s’est dite “extrêmement préoccupée” par ces violences et a appelé à la retenue et à la résolution de la crise dans le “respect de la longue tradition démocratique du Sénégal”. Des personnalités sénégalaises telles que le chanteur Youssou N’Dour ou le footballeur Sadio Mané ont également appelé au calme.